Chronique aéroportuaire II

Une petite heure avant le décollage. Dans un fauteuil en diagonale, un asiatique parlant anglais mange des morceaux de nourriture lisses et orthorhombiques de différentes couleurs que j'identifierai plus tard comme étant des morceaux de fruits et non un substrat protéique coloré et aromatisé sorti tout droit d'un film futuriste. J'en suis presque déçu mais la fatigue qui avait laissé libre cours à mon imagination me le fait oublier aussi vite. En face de lui mais de dos pour moi, les cheveux courts et le bras grassouillet, j'ai du mal à déterminer le genre. Finalement la discrète boucle d'oreille, la voix et le fait qu'il lui tende un prospectus à connotation vacancière m'indiquent qu'il s'agit de sa femme. L'heure de l'embarquement approche, mais pas d'annonce. La lounge se vide. Bientôt plus que nous trois. Notre asiatique s'inquiète et s'enquiert auprès de la réceptionniste. J'ai eu beau leur dire que l'avion n'était pas prêt, ils sont tous partis, explique-t-elle. Je finis de siroter tranquillement mon tonic.